L’artiste et intellectuel haïtien s’efforce de mieux faire connaître le vaudou, une culture autant qu’une religion originaire d’Haïti, malmené par des décennies de caricatures hollywoodiennes. Il est le commissaire associé de l’exposition « Zombis », actuellement au Musée du quai Branly, à Paris.
Erol Josué,au musée du quai Branly,à Paris,le 11 mai 2014. CYRIL ZANNETTACCI Pour Halloween,certains se sont peut-être déguisés en « sorcier vaudou » : les cheveux hirsutes,le visage dément et comme rongé par la lèpre,les dents carnassières prêtes à se déchausser… Une caricature qui « blesse » Erol Josué,véritable prêtre vaudou – houngan,en créole haïtien – aux antipodes de stéréotypes colonialistes,voire racistes,qui ont encore la peau dure.
Forgés par les éthologues nord-américains au début du XXe siècle,diffusés par le cinéma hollywoodien,« les clichés font passer Haïti pour une terre de sauvages »,déplore au Monde celui qui est également commissaire associé de l’exposition « Zombis. La mort n’est pas une fin ? »,au Musée du quai Branly jusqu’au 16 février 2025.
« Très jeune,je me suis fixé comme mission de porter une autre image du vaudou »,assure cet adepte de la religion traditionnelle du petit Etat caribéen,que l’on réduit souvent à une pratique de la magie noire,au gré des films qui l’ont rendu célèbre,du pionnier White Zombie (Victor Halperin,1932) à La Porte des secrets (Iain Softley,2005),en passant par Angel Heart. Aux portes de l’enfer (Alan Parker,1987).
Car l’homme est aussi un artiste,un danseur et un chanteur de renommée internationale,dans un groupe à son nom qu’il qualifie d’« électro vaudou ». Tout est lié,explique-t-il : « La musique et la danse ont un rôle fondamental de transmission de notre culture et de notre religion. » Redécouvrir,préserver et faire connaître ce patrimoine fait aussi partie de ses missions en tant que directeur général du Bureau national d’ethnologie (BNE) d’Haïti.
Né en 1974 à Port-au-Prince,Erol Josué grandit dans une famille d’adeptes du vaudou. Son arrière-grand-mère était une mambo (« prêtresse ») : c’est elle qui l’a initié à cette religion,à la connaissance des plantes et à la médecine traditionnelle. Sa mère,également devenue mambo,parfera son éducation.
En Haïti,tout le monde ne devient pas houngan,mais une pratique coutumière du vaudou n’a rien d’exceptionnel : « Toutes les familles participent à des degrés divers à des cérémonies traditionnelles,de la même façon que la plupart des Français font les fêtes du calendrier chrétien. »
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