Lors de son audition devant l’IGPN, Valérie B., dont la fragilité psychologique était connue de son service, a indiqué avoir cru que le jeune homme de 19 ans tenait une arme de poing dans sa main, qu’il s’apprêtait à diriger contre elle.
Graffitis sur lesquels on peut lire « Susu on t’aime » et « Repos en paix Susu »,dans la zone où Sulivan S. a été tué par une policière. A Cherbourg,le 19 juin 2024. LOU BENOIST / AFP La policière de 46 ans mise en examen pour meurtre après avoir tiré dans le torse d’un jeune homme de 19 ans à Cherbourg (Manche) était-elle en état de porter une arme létale ? C’est une des interrogations auxquelles devra répondre l’enquête ouverte depuis le décès de Sulivan S.,mortellement blessé le 9 juin par une balle tirée par une gardienne de la paix. La policière a,depuis,été mise en examen pour meurtre – fait rare pour un usage d’arme en service – puis placée sous contrôle judiciaire – autre fait rarissime dans la mesure où les suspects d’homicide volontaire sont généralement placés en détention provisoire.
L’histoire avait débuté par un banal appel pour tapage nocturne. Deux véhicules de police,soit six fonctionnaires,s’étaient déplacés. Au cours de l’intervention,ils avaient tenté de contrôler un véhicule circulant à vive allure,lequel avait pris la fuite. La course-poursuite s’était terminée quelques minutes plus tard,les trois occupants du véhicule tentant de s’échapper en courant – le véhicule,un SUV,avait été volé quelques semaines plus tôt. Sulivan S.,un des passagers du véhicule,s’était dirigé en courant vers l’équipage de police positionné à quelques dizaines de mètres de la voiture immobilisée.
Un premier policier avait alors tenté de bloquer le jeune homme en lui mettant un coup d’épaule,sans y parvenir,puis avait tiré avec son pistolet électrique,une arme non létale,le touchant au niveau du mollet. Au même moment,la gardienne de la paix Valérie B. avait fait usage de son Sig Sauer. Elle a décrit la scène en garde à vue devant l’inspection générale de la police nationale (IGPN) : « [Mon collègue] a crié à l’individu “arrête ou je te tase”. Il n’a eu le temps de le dire qu’une fois,l’individu était déjà à sa hauteur. (…) J’ai vu l’individu qui était sur le trottoir me désigner de sa main droite,il avait quelque chose dans sa main. Pour moi,c’était une arme de poing. Sa main venait de l’arrière au niveau de la poche de son pantalon dans ma direction,ce n’était pas un geste naturel de course »,a-t-elle expliqué. « Je l’ai interprété comme étant une sortie d’armes,je me suis senti en danger,j’ai eu peur,j’ai tiré une fois »,a-t-elle ajouté,évoquant « un instinct de survie ».
Le jeune homme s’est écroulé à côté de la fonctionnaire. Celle-ci affirme s’être alors rendu compte qu’il ne portait pas une arme mais un téléphone dans sa main : « Je me suis dirigée vers l’individu et lui ai ouvert le blouson noir qu’il portait. A cet instant,j’ai vu une auréole rouge,et j’ai constaté qu’il avait été blessé par balle. » La gardienne de la paix a alors demandé que la victime soit démenottée et lui a prodigué des premiers soins. Les pompiers et les médecins du SAMU ont pris le relais,sans succès : le jeune homme est mort quelques minutes plus tard.
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